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16 November 2013

Un évêque de Bayeux et les imprimeurs

Informer et s’informer : un évêque de Bayeux et les imprimeurs au XVIIIe siècle

Je me suis intéressé à la bibliothèque du Chapitre en poursuivant mes recherches pour compléter le travail de mon ami et homologue Alain Girard anciennement Conservateur pour le fonds régional dans la Bibliothèque Municipale de Caen. Pendant des années avant sa disparition en 1995 il avait ramassé beaucoup de matériel pour compléter le répertoire des livres imprimés en Basse-Normandie et aussi une prosopographie des gens du livre – c’est à dire un dictionnaire des imprimeurs et libraires actifs dans cette région entre les années 1701 et 1789, projet qui forme partie d’une entreprise nationale menée par Fréderic Barbier de l’Institut d’Historie Moderne et Contemporaine à Paris.

Les recherches d’Alain Girard avaient éclairé l’histoire des imprimeurs de l’évêque et du diocèse pendant le 18e siècle, une histoire qui est facile à raconter, la ville étant autorisée à n’avoir qu’un seul imprimeur. Les évêques de Bayeux ont employé cet imprimeur pour informer le clergé dans l’administration du diocèse. Quelquefois les instructions sont très importantes, par exemple le Mandement de monseigneur l’evêque de Bayeux, portant permission de manger des œufs pendant le carême, imprimé par Gabriel Briard « Imprimeur de Monseigneur l’Evêque & du Clergé » en 1768.

J-4-21/09.

1631-1660?Pierre Le Roux
1660-1700Marin Briard
1700-1717veuve marin Briard
1717-1770Gabriel Briard
1720-1721Jean-Augustin Duval
1770-1775veuve Gabriel Briard
1775-1784Antoine-Jean Nicolle
1784-1823veuve Antoine-Jean Nicolle
Table 1. Imprimeurs à Bayeux

La famille Briard était active comme imprimeurs [table] pendant le 17e siècle, Marin Briard entre 1660 et 1700. Apres son décès la veuve continua son établissement jusqu’en 1717 mais sans beaucoup d’activité. Elle « a une petite presse assortie. 4 sortes de fontes de vieux caractères sans assortiment » selon l’enquête de 1701. Pour cette raison au commencement du siècle Jean Cavelier de Caen imprime pour le diocèse, par exemple en 1701 le Mandement de monseigneur l'illustrissime ... évêque de Bayeux portant condamnation & defense du livre intitulé: Durand commenté, ou l'accord de la philosophie avec la théologie touchant la transsubstantiation de l'eucharistie. Le 10 avril 1717 Gabriel Briard, fils de Marin, est reçu par ordonnance du lieutenant général de police de Bayeux pour succéder à sa mère mais sans avoir régularisé ses titres auprès du Conseil. Jean-Augustin Duval dit le Grenadier réussit à s'établir à Bayeux et de faire défendre l'exercice de l'imprimerie à Briard par arrêt du Conseil du 9 août 1720. Mais après une requête au Conseil, Briard est maintenu imprimeur à Bayeux en concurrence avec Duval par un autre arrêt du 1 février 1721. Duval quitte la ville peu après et Briard réussit à rapatrier à Bayeux le travail pour le diocèse. Par exemple il imprime en 1732 Remontrances des fidéles de la ville de Bayeux, à M. de Luynes leur evêque. Plus important est Statuts pour le diocèse de Bayeux, publiés par Monseigneur Paul d'Albert de Luynes de 1735. Parmi les œuvres liturgiques on trouve Breviarium bajocense en 1738, et aussi une série de Mandements de l’évêque. Après son décès en 1770 la veuve lui succède comme imprimeur de l’évêque jusqu’en octobre 1775 quand elle se démet de sa place d'imprimeur.

Mais pendant cette période les imprimeurs caennais continuent d’imprimer pour Bayeux : plusieurs éditions des Heures nouvelles à l'usage du Diocèse de Bayeux sortent de la presse de Pierre Chalopin. À Falaise en 1770 Pitel- Préfontaine publie un paroissien à l'usage de Bayeux avec musique notée, ouvrage imprimé à Caen pour lui probablement par Chalopin ou Pyron.

Un arrêt du Conseil d’État privé du Roi du 18 décembre 1775 ordonne que le sieur Antoine-Jean Nicolle sera reçu pour occuper la seule place d’imprimeur-libraire autorisé en 1759 pour Bayeux, en la place vacante par la démission de la veuve Gabriel Briard, « Sa Majesté l’ayant dispensé, par grâce et sans tirer à conséquence, de rapporter un brevet d’apprentissage et des autres formalités. » Il achète l’imprimerie de la veuve Gabriel Briard à Bayeux qui se démet en sa faveur le 13 octobre 1775 « a un très haut prix » selon la veuve Nicolle en 1810. Un exemple de son travail pour le diocèse est Catéchisme ou abrégé de la foi et de la doctrine chrétienne, imprimée par ordre de Monseigneur Pierre Jules César de Rochechouart, évêque de Bayeux en 1786. Nicolle réimprime les statuts de 1735 pour l’évêque Joseph-Dominique de Cheylus en 1781 et aussi Office de la Semaine Sainte en 1780. Après son décès en 1784 la veuve continue comme imprimeur jusqu’en 1823. En 1787 par exemple elle imprime pour le diocèse Office du jour de Noël. Mais la situation change. En 1789 elle publie Adresse de M. l’evêque, et du chapitre de l’église cathédrale de Bayeux à MM. qui composent l’Assemblée générale de ladite ville. Selon la veuve Nicolle la Révolution porte un coup très dur a l’établissement par « la perte totale des ses fonds de magasin qui consistait en livres classiques, livres d’église, catéchismes, coutumes de Normandie, et autres de ce genre que la Révolution a anéantie et que son mari et elle avaient imprimés à un très grand nombre d’exemplaires parce qu’ils en avaient seuls le privilège ». En 1791 la veuve Antoine-Jean Nicolle est désignée imprimeur de l’Evêque du Calvados, Claude Fauchet (1744 -1793). Quand elle imprime Sermon sur l'accord de la Religion et de la liberté, prononcé dans la métropole de Paris, le 4 février 1791, pour la solemnité civique des anciens représentans de la Commune en 1791, il est « Réimprimé par ordre de la Société des amis de la constitution de Bayeux. Nous ne sommes plus dans l’Ancien Régime et au commencement du nouveau siècle le diocèse de Bayeux est remodelé le 15 août 1801, correspondant désormais au département du Calvados.

C’était en quête à ces imprimeurs et libraires bajociens pendant le 18e siècle que je suis arrivé à Bayeux, où j’ai appris qu’il se trouvait peut- être un trésor caché dans les recueils factices de la bibliothèque du chapitre, une série de volumes connue des conservateurs mais dont le contenu n’avait pas encore été catalogué.

Tous ces volumes appartenaient à l’origine à la bibliothèque de la Mission de Bayeux. Comme nous avons appris hier, les fonds anciens que nous connaissons à Bayeux aujourd’hui sont le résultat d’un dépouillement d’un grand entassement de livres, le résultat des bouleversements de la révolution. Fréderic Pluquet dans son Essai historique sur la ville de Bayeux (Caen : chez T. Chalopin ; Bayeux, chez Clement Groult , 1829) nous révèle (pp. 241-244) qu’en l’an II (1794), une commission pour la conservation des objets d’arts est établie qui rassemblèrent « tous les livres provenant des couvents, des établissements publics, des émigrés et des prêtres déportés du district de Bayeux. Leur nombre s’élevait a près de 30,000 volumes déposes pêle-mêle dans les appartements de la doyenne ou l’on eut un moment le projet d’établir un musée ». Malgré le désordre du temps la commission réussit à classer les livres et en dressa un catalogue. Apres la réaction du 9 thermidor an II (1794) une portion fut rendue aux propriétaires ou à leurs héritiers. Tous ceux non réclamés et surtout ceux provenant des établissements religieux formaient encore une masse de près de 24,000 volumes, dont beaucoup jugés sans intérêt et sans valeur. On parvint à en extraire 4 à 5000 volumes plus utiles, qui furent places dans une des salles du chapitre, qui fut ouverte au public à certaines heures ; le noyau de la bibliothèque était ainsi formé. Pluquet continue : « L’humidité et les vers détruisirent beaucoup de livres. Un vol avec effraction eut même lieu dans un des dépôts, des soustractions particulières qui roulaient presque toujours sur les livres les plus précieux eurent aussi lieu. » En 1804 il existait encore un dépôt de 21 545 volumes dans un désordre incomparable (page 129 du registre de correspondance de la commission des arts). Le bibliothécaire François Moysant (1735-1813) « vint à Bayeux faire le choix de ce qui lui convenait pour la bibliothèque de Caen. Le chapitre, le séminaire et le collège prirent aussi ce qu’ils voulurent, et le rebut fut vendu à la livre. »

Après une telle histoire ce n’est pas à surprendre que les volumes provenant des collections de la Mission se trouvent dispersés parmi les bibliothèques à Bayeux et sans doute à Caen. Pour mes enquêtes j’ai examiné et catalogué le contenu de 51 volumes de la bibliothèque du chapitre et un volume de la Médiathèque Municipale de Bayeux.

La Mission est la désignation du séminaire de Bayeux qui doit son origine au chanoine Gilles Buhot, et à François de Nesmond, évêque de Bayeux. Par acte du 11 mars 1668, Gilles Buhot donne au diocèse une maison et ses dépendances pour y établir un séminaire. Le 11 avril suivant, l’évêque érige le séminaire, en confiant la direction à Gilles Buhot. L’établissement est confirmé par lettres patentes en août 1669. Dans son acte de donation, Gilles Buhot, mort en 1674, manifeste le désir qu'à défaut des prêtres du diocèse pour la direction du séminaire, on fait appel à une communauté et de préférence à la Congrégation de la Mission ou Lazaristes pour laquelle il a « plus d'inclination ». François de Nesmond se rend à ce désir, non sans susciter un certain étonnement dans la région, les autres séminaires de Normandie étant dirigés par les Eudistes et il signe le 7 septembre 1682 le contrat qui établit les Prêtres de la Mission directeurs à perpétuité du séminaire. Les lettres patentes délivrées à Fontainebleau en août 1683, sont enregistrées au Parlement de Rouen le 13 mai 1684. Les Prêtres de la Mission s'installent au séminaire de Bayeux en 1682 dans la maison, cédée en 1669 par le chanoine Gille Buhot. [Séminaire] Les travaux de construction d’un nouveau séminaire furent entrepris en 1693; ils n'étaient pas encore achevés en 1705. Le séminaire est aboli en 1790. (Félix Contassot. La Congrégation de la Mission et les Séminaires au XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, 1968.)

L’examen des volumes a été une déception quant au nombre d’imprimés bajociens qui ne s’élèvent qu’à une cinquantaine dont plusieurs doubles, mais la collection donne un coup d’œil intéressant sur la manière dont le diocèse et le séminaire se sont informés pendant plus d’un demi-siècle.

Vers 1773 il parait qu’on a décidé de mettre en ordre les entassements de papiers imprimés qui se trouvaient dispersés dans la Mission. Heureusement la tache n’est pas très bien accomplie. Ils n’ont pas bien trié les documents qui ont été reliés à peu près dans l’ordre qu’on les a trouvés. Ainsi on découvre plusieurs copies des mêmes documents reliés l’un après l’autre. Le relieur a quelquefois cousu un document au milieu d’un autre. [Reliures] Le relieur a estampillé le dos du volume avec un bref titre pas tellement explicatif de manière que, plus tard, un bibliothécaire l’a trouvé nécessaire de numéroter en encre beaucoup des volumes avec une indication plus évidente de leur contenu. Le numérotage s’étend au moins jusqu’à 59, ce qui montre qu’il reste des volumes à découvrir.

Les pages de quelques volumes sont numérotées, plus souvent les documents sont numérotés avec une liste manuscrite du contenu au commencement. [Ex libris] En six instances on trouve une cote dans la bibliothèque et en deux cas l’annotation « Ouvrages anticonstitutionnaires et défendus ». Les 52 volumes contiennent environ 1418 documents.

La répartition de dates révèle peu d’imprimés avant 1725, sauf pour l’année 1719. Après 1724 ils deviennent plus nombreux surtout après 1743 avec la culmination en 1772, la dernière année complète représentée dans la collection.

16- -117-- 23  172-1  174-6      
16321168911710117206173023174011175028176016177021
16521169021711117218173114174110175123176115177140
1656116961171251722417322174291752621762131772191
166411699217130172381733101743817534617633617734
16651170041714217244173420174472175418176434Tot.256
166611705017154172512173517174536175553176520  
16711170601716217266173617174630175653176618  
16731170721717917271517378174727175723176717  
167911708117188172814173817174831175813176845  
168311709717191517296173915174961759221769331632-1773
Tot.11Tot.43Tot.47Tot.84Tot.143Tot.246Tot.341Tot.247Tot.1418
Table 2. Date d’impression

Ils viennent de plus de 60 localités, dont une dizaine ont plus de dix impressions. La table montre les éditions qui sont certainement ou probablement imprimées dans les villes recensées, mais il y a 206 éditions où il est impossible de savoir avec certitude le lieu d’impression. C’est probable que la plupart d’entre eux ont leur origine à Paris. Paris est certainement responsable pour 63% des impressions identifiées suivi par Evreux avec 9% et Bayeux et Rouen avec chacun 4%. Seulement Orléans, Laon, Auxerre et Rome représentent plus de 1%. :

Lieu d’editionImpressionsLieu d’editionImpressions
Paris760Laon17
Evreux107Auxerre15
Bayeux51Rome13
Rouen51Toulouse11
Orléans25Aix, Blois, Troyes9
Table 3. Lieu d’impression

Les imprimeurs les plus représentés sont dans la famille Simon. Le plus connu pendant notre période, Pierre-Guillaume Simon, dont les 404 impressions s’étendent de 1741 jusqu’en 1772 porte une lourde série de charges : Imprimeur du Clergé de France (1741-1745), Imprimeur du Grand Conseil du Roy (1744-1753), Imprimeur de Monseigneur l’Archevêque (1744), Imprimeur de l’Ordre de Cluny (1745), Imprimeur de Monseigneur le Comte de Clermont (1745 -1746), Imprimeur du Parlement (1744-1772), Imprimeur du Collège de Louis- le-Grand (1764-1770). Ils sont responsables pour la plupart des publications officielles et législatives émanantes de la métropole : les édits du Roi, les arrêts du conseil d’état du Roi, les arrêts du parlement de Paris. La famille Simon est suivi par la famille Malassis à Evreux, Jean Malassis, représenté entre 1712 et 1753, Imprimeur du Roi 1734-1753, de Monseigneur l’Evêque 1712 -1753, de la Ville 1734-1753 et du Collège 1712-1753, suivi par la veuve entre 1761 et 1763, elle aussi Imprimeur du Roi et de Monseigneur l’Evêque. Ses impressions sont plus fréquentes que celles de l’Imprimerie royale représentée entre 1730 et1772 avec 56 imprimés et aussi plus fréquentes que celles de la famille Briard à Bayeux. Gabriel Briard est représenté avec 14 imprimés seulement à partir de 1757 jusqu’en 1769 comme Imprimeur de Monseigneur l’évêque et du Clergé. Il est succédé par la veuve avec 36 publications en deux ans non seulement comme Imprimeur de Monseigneur l’Evêque et du Clergé mais surtout parce qu’elle devient Imprimeur du Conseil Supérieur de Bayeux, établi en 1771.

LieuFamilleImpressions
ParisSimon404
EvreuxMalassis102
ParisImprimerie royale56
BayeuxBriard50
RouenLe Boullenger35
ParisDesprez29
ParisGarnier26
ParisMazieres et Garnier19
ParisHerissant17
LaonCourtois17
Table 4. Imprimeurs

Comme nous avons constaté les documents officiels et législatifs forment une grande partie de la collection avec 14 édits du Roi dont 11 en 1772, 143 arrêts du conseil d’état du Roi, surtout entre 1740 et 1772, et 156 arrêts de la cour du parlement. La plupart de ces arrêts sont du parlement de Paris, mais il y a une proportion signifiante des parlements provinciaux, surtout de Rouen, le parlement pour la Normandie.

Arrest de la cour du parlement 156 (surtout 1735-1772)
Paris 129
Rouen 14
Bretagne 3
Normandie 3
Provence, Toulouse 2
Aix, Besançon, Metz 1
Table 5. Arrêts des parlements

Il est évident que la collection a été formée par quelqu’un qui voulait s’informer sur le situation non seulement à Paris mais aussi dans les provinces. En analysant les mentions des divers diocèses on trouve que l’église à Paris est la plus mentionnée mais le diocèse d’Evreux est le plus représenté du point de vue du nombre d’impressions. Les mentions des diocèses sont en ordre décroissant : Orléans, Rouen, Auxerre, Laon, Montpellier, Bayeux, Soissons, Langres, Tours, et Lyon. Les mentions se trouvent dans les arrêts, les harangues, les lettres les mandements etc. Prenons comme exemple les mandements des évêques dont on trouve 226 exemples dans la collection, 16% du total.

DiocèsesMandementsDates
Evreux811711-1763, surtout 1745-1753
Paris31 
Rouen18 
Bayeux151757-1772
Laon131731-1747, surtout 1743-1747
Orléans6 
Table 6. Diocèses

Il est intéressant d’examiner de plus près les mandements pour chanter le Te Deum.

Mandement pour chanter le Te Deum98 
Evreux481721-1753, surtout 1734, 1744- 1753
Paris171734-1758, surtout 1744
Rouen91744-1757, surtout 1744
Laon91743-1744, surtout 1744
Bayeux51757
Auxerre, Boulogne, Chartres, Langres, Lyon, Montauban,
St- Germain-des-Prés, Soissons, Toul, Tours
1 
Table 7. Mandements pour chanter le Te Deum

Il est nécessaire de rappeler qu’avant d’émigrer de France en Angleterre pendant la révolution le bon Dieu était français et a beaucoup assisté la France. Le Roi en était très reconnaissant. Ainsi on trouve dans la collection 98 mandements épiscopaux suivant la réception d’une lettre de Sa Majesté pour faire chanter le Te Deum dans les paroisses des diocèses en actions de grâce pour les faveurs divins. Trois des guerres du 18e siècle sont représentées. En 1734 on célèbre la prise de Philisbourg pendant la Guerre de Succession de Pologne.

J-4-05/041.

La Guerre de Succession d’Autriche produit une série de mandements, pour la prise d’Ath en 1743, les prises d’Ypres, de Furnes, de Menin, du comté de Nice en 1744,
J-4-42/09.

les campagnes en Flandres en 1745, dans les Pays Bas et la prise de Bruxelles en 1745.
J-4-15/09.

La guerre de Sept Ans est représentée par les victoires [J-4-15/09] contre les Hanovriens en 1757 et 1758 et la paix garantie par le traité de Paris en 1763.
J-4-05/74.

Mais Dieu trouve aussi le temps d’assister la famille royale de la France : [J-4-15/09] dans l’accouchement de la reine en 1727, de la dauphine en 1750.
J-4-05/29.

On célèbre aussi la naissance du Duc de Bourgogne en 1745 et 1751 et du Duc d’Aquitaine en 1757. La santé du Roi est l’objet du Te Deum en 1721 et 1744, et la santé du Dauphin en 1752.
J-4-05/034.

En effet, Dieu est si préoccupé par ses activités pour la France qui le pape Benoît XIII le trouve nécessaire d’avertir les français d’implorer le secours divin au commencement de son pontificat pour bien gouverner la sainte église catholique (Orléans : la Veuve de François Borde Imprimeur de l’Evêque d’Orléans & de l’Université, 1724).
J-4-05/13.

Toujours en 1769 le Pape Clément XIV fait implorer l’assistance divine au commencement de son pontificat, document dont plus de neuf copies sont reliés l’un après l’autre dans un des volumes de notre collection.
J-4-15/10.

Une analyse de ces 1418 documents provoque des questions. Pourquoi les imprimés commencent-t-ils à devenir plus fréquents après 1724 ? Pourquoi y a-t-il plus d’imprimés originaires d’Evreux que de Bayeux ? Pourquoi tant d’imprimés du diocèse de Laon ? J’étais frappé par la similarité de style des Mandements d’Evreux et de Bayeux mais en préparant la liste des documents je n’avais pas les deux documents sous mes yeux en même temps. C’est seulement plus tard en regardant les images de plus près que j’ai constaté que le même nom et la même gravure en bois apparaissent sur les deux séries de documents et j’ai découvert que Pierre-Jules-César de Rochechouart était évêque d’Evreux avant de devenir évêque de Bayeux en 1753. Alors cette collection de documents n’avait rien à faire avec le séminaire de Bayeux mais n’est rien d’autre que la collection personnelle de l’évêque, arrivée avec lui à Bayeux, où il continua d’ajouter les documents jusqu’en 1773 quand, pensant peut-être déjà à sa démission en 1776, il les donna à la bibliothèque de la mission.

J-4-15/03.
J-4-15/04.

Voilà ce qui explique la présence sur beaucoup des documents non seulement de l’inscription manuscrite « A Monseigneur l’Evêque de Bayeux » mais également « A Monseigneur l’Evêque d’Evreux ». En se rendant compte de l’origine de la collection on peut analyser plus facilement son contenu.

Pierre-Jules-César de Rochechouart est né le 8 mars 1698 et devient d’abord Vicaire Général de l’Evêque d’Orléans. Cela explique la présence parmi les premiers documents dans la collection plusieurs imprimés concernant Orléans. Le plus ancien est une lettre Au révérend père, le révérend père de la Haye, recteur du College des Peres Iesuites d’Orleans (1632 ?) au sujet des confessions reçues par le clergé régulier sans permission de l'ordinaire.

J-4-01/11.

De 1683 on trouve Arrest de la cour de parlement pour les doyen, chanoines & chapître de l’église d’ Orleans. Contre Me François De Menou, chanoine sous-diacre & sous-chantre de ladite église (1683) avec une confirmation quelques années plus tard.
J-4-41/04.

Un autre document Lettre à monseigneur l’evêque d’Orleans, qui contient un mémoire justificatif pour les curez de son diocese, qui ont acceptez la constitution, en obéissant à son mandement (1717) anticipe la préoccupation de Rochechouart à Evreux avec la bulle Unigenitus.
J-4-54/04.

L’Arrest de la cour de parlement, qui ordonne que lécrit intitulé : Lettre de M. l’evesque de Soissons à […] monseigneur le duc d’Orleans regent du royaume […] sera laceré & bruslé par l’executeur de la haute justice (Paris, 1719) introduit la préoccupation de l’évêque de d’être au courant avec les livres prohibés.
J-4-41/13.

Une feuille volante de 1721 Copie de la lettre de S. A. R. monseigneur le duc d’Orleans regent, aux agens généraux du clergé de France, un appel aux diocèses de contribuer aux secours nécessaires pour le soulagement des villes et communautés de Provence qui sont affligées du mal contagieux porte l’inscription manuscrite « A Monseigneur l’Evesque d’Orleans ou a Monsieur son Grand Vicaire », premier exemple des inscriptions « A Monseigneur l’Evêque d’Evreux » ou « A Monseigneur l’Evêque de Bayeux » qui figurent sur les documents dans la collection.
J-4-38/49.

Il est nommé évêque d'Evreux le 1er septembre 1733 et se fait sacrer le 21 mars 1734 par son métropolitain, le cardinal de Saulx-Tavannes, archevêque de Rouen. C’est surprenant que les documents qui ont référence au diocèse de Rouen commencent seulement pendant les années 1730. En 1741 il est le co- consécrateur de son cousin, le cardinal de Rochechouart, lorsqu’il est sacré évêque de Laon et on trouve dans les années 1740 une série de mandements et autres documents provenant du diocèse de Laon. À Évreux, de Rochechouart se préoccupe de liturgie en faisant éditer un nouveau bréviaire et de la formation des fidèles et de son clergé pour qui il fonde un séminaire.

J-4-42/02.

Il est défenseur des jésuites et manifeste sa volonté de faire appliquer la bulle Unigenitus de septembre 1713 où le pape Clément XI dénonce les jansénistes, en faisant interdire de donner les sacrements à ceux qui refuseraient d’appliquer les préceptes de la bulle. On trouve un grand nombre de documents sur ce sujet controversé qui bouleverse l’église en France pendant une grande partie du 18e siècle. Il y a 34 documents où la constitution Unigenitus est mentionnée dans le titre dont sept en 1719 et douze pendant les années 1720.

J-4-41/20.

Il y a aussi plusieurs documents sur les Jansénistes surtout entre 1728 et 1730, par exemple une série de mémoires « sur les projets des Jansénistes ».
J-4-14/04.

L’affaire du refus des derniers sacrements se manifeste plus tard dans la collection avec une trentaine de titres entre 1745 et 1756, après la décision en 1746 de Christophe de Beaumont, archevêque de Paris, que les fidèles doivent pouvoir justifier d'un billet de confession signé d'un prêtre favorable à la bulle Unigenitus pour recevoir la communion ou les derniers sacrements. Pour l’évêque d’Evreux la culmination arrive en 1753 quand un prêtre Janséniste à Verneuil est refusé les sacrements. Le parlement de Rouen s’oppose aux actions du diocèse d’Evreux et la Couronne prend la défense. Le 19 juillet 1753, quand le prêtre Janséniste attend toujours l'extrême-onction le Parlement de Rouen adresse un nouvel arrêt à l'évêque d'Evreux, lui enjoignant de mettre fin au « scandale qui subsiste dans la ville de Verneuil par le refus de Sacremens ». La demande reste sans réponse et le 28 juillet il est condamné à payer une amende de 6 000 livres, et le 1er aout le Parlement décide de convoquer l'évêque. Une querelle avec la couronne s'ensuit, le Conseil du Roi ordonne que les arrêts fussent rayes des registres du Parlement de Rouen. (Voir: Matthew Levinger. La rhétorique protestataire du Parlement de Rouen (1753-1763) Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 1990, vol. 45:3, pp. 589-613.) Des imprimés touchant cette controverse se trouvent dans la collection y compris Arrest du conseil d’état du Roi, qui casse & annulle un arrêt du parlement de Rouen du 17. May 1753. & une sentence du baillage de Verneüil, du 30. Mars précédent, rendus a sujet d’un refus de sacremens fait par le sieur Lemercier curé de la Megdeleine dudit Verneüil […]. Du vingt-cinq May 1753.
J-4-12/19.

Suite à cette affaire il est nommé évêque de Bayeux le 18 août 1753 où il continue à s’intéresser à la formation de ses fidèles en faisant éditer un missel. Mais la politique du parlement est en général favorable aux jansénistes, et hostile aux jésuites. De Rochechouart a de la sympathie pour les jésuites et sa collection possède une trentaine de documents sur la Compagnie de Jésus, surtout en 1763 et 1764 pendant la série d’arrêts défavorables à la Compagnie de Jésus sous la présidence de Armand Thomas Hue de Miromesnil.

J-4-37.
04/07a.

Parmi eux on trouve un des rares documents manuscrits dans la collection qui commence: « Je soussigné pretre religieux de la Compagnie de Jésus declare que je me soumets sincerement au mandement de monseigneur l’archeveque de Paris […] » en date : a Paris ce 21 Xbre. 1753, signé J. S. Jos. Berruyer de la Compagnie de Jésus. On trouve aussi Édit du Roi, concernant la société des Jésuites. Donné à Versailles au mois de Novembre 1764
J-4-02/16.

et concernant la région de Normandie : Arrest de la cour du parlement de Rouen, concernant la vente des biens des ci-devant soi-disant Jésuites, & injonction aux créanciers d’iceux de se présenter dans le délai de six mois, du 21 Juillet 1764.
J-4-37/25.

C’est une période quand il était important d’être au point sur les idées qui étaient acceptables aux autorités et ce n’est as à surprendre qu’on trouve beaucoup d’arrêts interdisant des livres. Les œuvres des philosophes sont considérés « comme scandaleux, contraires à la religion, & aux bonnes mœurs ». Ainsi on trouve en 1746 un Arrest de la cour du parlement, qui condamne deux livres intitulez : l’un, Histoire naturelle de l’âme ; l’autre, Pensées philosophiques, à être lacerez & brûlez par l’exécuteur de la haute justice.
J-4-41/45.

Julien Offray de La Mettrie (1709-1751) auteur de l’ Histoire naturelle de l’âme, était un physicien et philosophe, un des premiers matérialistes de l’âge des lumières, et Pensées philosophiques est un des premières œuvres de Denis Diderot. En 1762 on trouve une œuvre encore plus connue prohibée dans un Arrest de la cour du parlement, qui condamne un imprimé ayant pour titre : Emile, ou de l’éducation ; par J. J. Rousseau, imprimé à la Haye …. M. DCC. LXII. à être lacéré & brûlé par l’exécuteur de la haute-justice.
J-4-39/40.

De Rochechouart s’intéresse aux affaires politiques et pendant les années 1740 il est évident dans une série de documents dans le volume Vol. J 4° 38 qu’il suit le progrès des guerres avec intérêt. Par exemple on trouve la Relation de la campagne du Roi de Prusse en Silésie de l’an 1745 et de la bataille de Friedeberg gagnée par le Roi sur l’armée combinée autrichienne & saxonne le 4 de Juin 1745.

J-4-38/14.

La Relation de la prise de Berg-op-Zoom en 1747 est même illustrée par des gravures de la bataille.
J-4-38/34.

Treize années plus tard il ajoute á sa collection le Journal de la campagne de LX. Entre l’armée du Roi aux ordres de monseigneur le maréchal duc de Broglie ; et celle des alliés, commandée par S. A. S. Mgr. le prince Ferdinand de Brunswich, par un officier de dragons, publié en 1761 avec deux cartes.
J-4-38/35.

Plusieurs de ces conflits sont avec les troupes Anglais. Le duc de Cumberland et le prince Edward, prétendant au trône d’Angleterre figurent dans la Relation veritable, de la victoire remportée par Louis XV. Roy de France, et de Navarre, sur l’armée des alliés, commandée par le duc de Cumberlande, le velt-maréchal de Conicseck, & le comte de Waldecq, à la bataille de Fontenoy, près du bourg d’Antoin, le 11 de May 1745 et la Victoire remportée par le prince Edouard sur mylord Loudon, et sur l’avant-garde du duc de Cumberland en 1746.
J-4-38/12.

Dans le même volume, J 4° 38, on trouve qu’il a gardé une série de prospectus pour les livres et journaux qui montre l’intérêt de l’eveque pour la littérature. On peut comprendre sa sympathie pour l’œuvre Préjugés légitimes contre l’Encyclopédie, & essai de refutation de ce dictionnaire, examen critique du livre de l’esprit. In-12. 8. vol. A Paris, chez Herissant, rue Notre-Dame, dont le prospectus date de 1758.

J-4-38/54.
Mais on trouve aussi une grand variété d’autres sujets, par exemple : Prospectus d’un nouvel ouvrage sur les officialités ou il est traité des matières civiles et des matières criminelles en 1766,
J-4-01/05.
Projet de souscription pour la carte générale de la France en 173 feuilles, proposé par M. Cassini de Thury en 1758,
J-4-38/65.
et aussi des œuvres périodiques comme : Avertissement au sujet du nouvel ouvrage périodique intitulé L’année littéraire. Par M. Fréron des académies d’Angers, de Montauban & de Nancy de 1754 ou Avertissement au sujet du Journal de médecine, chirurgie & pharmacie de 1758.
J-4-38/63.
Vers la fin de sa carrière il reçoit un grand nombre de publications officielles, pour la plupart de Paris, mais de plus en plus l’imprimeur à Bayeux s’occupe plutôt à imprimer pour le Conseil Supérieur de Bayeux, nouvellement établi, que pour les besoins du diocèse. Un document important est l’Édit du Roi, portant création d’un conseil supérieur dans la ville de Bayeux. Donné à Versailles au mois de Septembre 1771, imprimé par la Veuve Briard, Imprimeur du Conseil Supérieur.
J-4-33/53.

De Rochechouart donne sa collection à la Mission de Bayeux en 1773. Trois années plus tard il se démet de son évêché et de ses abbayes en 1776 et meurt le 24 janvier 1781 à Montigny où il s’est retiré.

En découvrant l’origine de cette série de volumes dans la bibliothèque du Chapitre il a été possible d’apprécier comment un des évêques de Bayeux a employé les imprimeurs dans la ville et ailleurs pour informer le clergé sur l’administration du diocèse et pour s’informer sur la situation nationale. J’espère qu’en préparant un catalogue de la collection j’ai pu ouvrir le chemin pour les recherches plus approfondis dans la bibliothèque qu’on vient de remettre en valeur.

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Dernière revision de cette page 15 novembre 2013.